Des tutoriels par et pour les élèves : un projet ambitieux mais réaliste

, par THIERY Céline

Comment remotiver les élèves en 3ème en vue du Brevet de français ?

Ce projet est né de cette interrogation et de l’inquiétude des élèves : « Madame, qu’est-ce qu’il y a à apprendre en français ? ». Face à des élèves souvent perdus et démunis devant leur classeur est venue l’idée qu’une vidéo était peut-être moins rébarbative qu’une leçon et tout autant synthétique que la fiche de révision papier. La forme du tutoriel bien connue des élèves s’est imposée à nous, à la fois pour mettre au clair des savoirs (les notions à connaître en fin de 3ème) et des savoir-faire (les méthodes pour utiliser ces savoirs) indispensables pour réussir cette épreuve du Brevet. L’intérêt de la démarche : c’est aux élèves de construire, filmer et monter cette vidéo pédagogique destinée aux élèves de 3ème.

De l’élève rédacteur ou présentateur à l’élève technicien et réalisateur

Après que quelques thèmes ont été proposés aux groupes d’élèves, ceux-ci ont soumis leurs idées et suggestions de tutoriels : comment rédiger les questions du brevet en français ? Quelles sont les différentes valeurs d’emploi des différents temps ? Comment réussir le sujet de réflexion ?...
Les conditions du projet étaient les suivantes : les élèves devaient travailler en groupes à l’écrit puis créer une vidéo en se filmant en classe (ou dans les couloirs) grâce à leur téléphone, en 3 heures et en autonomie complète ; les élèves réalisateurs devaient ensuite travailler chez eux pour monter la vidéo sans intervention du professeur.
Je les ai invités en classe à utiliser leur téléphone et à regarder des tutoriels sur le net pour avoir un regard critique et proposer des vidéos différentes. Les tutoriels trouvés étaient essentiellement créés par des professeurs devant leur tableau sans vrais montages.
Pour préparer le tutoriel, les groupes ont relu leurs cours, entrepris des recherches sur internet, feuilleté des manuels puis rédigé une synthèse écrite.
Nous avons défini ensuite les rôles de chacun (écrivain, présentateur, technicien, réalisateur/monteur… parfois un élève pouvait être polyvalent).
La première prise a rarement été la bonne mais a permis de mettre au jour les améliorations nécessaires :
• Pour les « écrivains » : synthétiser et choisir les informations, les mettre en ordre, choisir des exemples convaincants.
• Pour le présentateur : apprendre le tutoriel sans lire son papier car il s’agit d’un oral, travailler les formules orales, adopter une bonne posture, regarder la caméra, sourire.
• Pour le technicien : prendre le téléphone horizontalement, filmer en gros plan, vérifier la hauteur du son, trouver une stratégie pour permettre l’aide papier.
• Pour le réalisateur : monter grâce à un logiciel (movie maker ou imovie), insérer des titres, des exemples, des tableaux, des musiques, exporter le fichier.

Des élèves autonomes et acteurs d’une pédagogie inversée

Les enjeux étaient multiples pour les élèves, tout comme les compétences à développer :
• Parvenir à synthétiser leur cours voire à le créer et sélectionner les informations importantes
• Gagner en autonomie et s’approprier par eux-mêmes les savoirs et savoir-faire
• Devenir les acteurs de leur savoir, oser se mettre devant la caméra et trouver la bonne posture
• Apprendre à monter (en regardant des tutoriels !) et faire des choix pédagogiques
• Savoir travailler en groupe et mettre en valeur les compétences de chacun voire les transférer aux autres
• Faire preuve de sens critique pour améliorer son travail

Le bilan

Tout d’abord, les élèves ont parfois rencontré des difficultés liées au matériel ou à la gestion du temps : les téléphones n’offraient pas tous la même qualité de son et d’image sans compter que certaines activités nouvelles étaient chronophages et demandaient une auto-formation des élèves (internet ou entre eux). De plus, certains groupes ont dû recommencer car leur travail de recherche n’était pas assez abouti ni approfondi ou encore le présentateur ne connaissait pas assez bien son texte ou était trop timide pour prendre la parole devant la caméra. Enfin, le résultat était parfois décevant, pas assez pédagogique pour apporter une aide aux autres élèves.
Cependant, l’expérience a été très positive. Alors que certains élèves semblaient réticents à passer devant la caméra, tous les groupes ont créé un tutoriel et toutes les autorisations pour les filmer ont été signées par les parents. D’ailleurs, les élèves ont ressenti une réelle fierté de se voir et un véritable intérêt à regarder les tutoriels des autres groupes tout en gardant un regard bienveillant mais critique. Le projet a permis aussi de valoriser des élèves qui avaient des difficultés en classe à l’écrit, grâce à leur prestation orale ou à leurs compétences informatiques. Les savoirs et savoir-faire mis en lumière par les tutoriels ont gagné en clarté et ont été mieux compris par l’ensemble des élèves qui sont devenus les actants d’une pédagogie inversée. Ces tutoriels ont servi de vrais supports à la révision du brevet pour toutes les classes de 3ème du collège grâce à leur diffusion sur le blog de français de l’ENT.

Sitographie

Lien sur l’Institut Français de l’Education sur l’enseignement explicite.
http://centre-alain-savary.ens-lyon.fr/CAS/documents/publications/docs-enseignement-plus-explicite/dossier-ressource-explicite

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